Le Guatemala : le pays aux reliefs démesurés

Après six fabuleux mois au Mexique, je m’envole vers le Guatemala pour un nouveau chapitre américain.

C’est ému que j’arrive au Guatemala. 
Ému par la tournure que prend mon aventure. 
J’ai rêvé de pouvoir partager mon aventure avec les enfants. 
Et ce projet devient réalité. De belles choses restent à venir. 

Ce 3 mai 2021 j’arrive à l’aéroport de Guatemala City après 3 semaines à Loreto (Mexique).
Il est 23h, une dizaine de personnes stupéfaites me regarde en train d’assembler ma machine. 
Une fois prêt, je m’en vais en fanfaronnant dans les rues guatémaltèques, direction la maison de mes hôtes.
Découvrir un pays, les drapeaux, le trafic, l’architecture depuis le vélo m’est si jouissif. 
Je rejoins la maison de la famille de Sergio, une famille locale, spécialisée dans la vente de panneaux solaires. 
Ici j’attends mon ami Gabin. Il vient me rejoindre depuis le Portugal pour 15 jours d’aventures. 


Deux ans que nous ne nous sommes pas vus. Dans la frénésie de nos retrouvailles, nous préparons notre périple vers Tikal. 
Mon cher Gabinou embrasse le vélo de montagne de notre hôte Sergio. 
Mon bicloune fait office de mule : 70kg à tracter dans les montagnes du pays des chapines.
Nous filons vers Antigua. Dès les premiers mètres, nous comprenons que nous allons en baver. 
Les pentes sont dignes d’une piste noire himalayesque. Coûte que coûte, nous avancerons. 


La magie du volcan Del Fuego 

Dans la ville coloniale d’Antigua, nous siégeons à la police du tourisme en préparant l’expédition vers le mythique volcan « Del Fuego » . 
Les informations collectées, nous prenons la direction de La Soledad. 
En passant par Villa Nueva et par des chemins terreux, nous poussons les vélos à bout de bras jusqu'au campement AKT (2300m).
Quelle entame pour mon Gabin, et ça ne fait que commencer !

C’est depuis ce campement que nous partons sans guide dans cette longue ascension, 2000m de dénivelé positif au programme. 
Faute d’équipements, nous montons à l’aide d’un bâton porteur. 
Peu à peu nous passons au-dessus des nuages, la végétation évolue au rythme des mètres grimpés. 
De la jungle aux sapins, de la terre à la pierre volcanique, nous faisons preuve d'entraide pour épargner nos pauvres épaules. 
L’excitation monte quand nous entendons les éclats sonores du volcan grondonnant. 
Après 5h30 d’ascension, nous installons le bivouac sur le flanc ouest de l’Acatenango, à une altitude de 3500 m. 

Face à nous, le volcan « El Fuego » dégaine des explosions toutes les 15 minutes. 
Lorsque le soleil se couche, le spectacle devient dément.
La lave surgit et se déchaîne sur les vallées. 
Nous sommes bouche bée, ébahi par ce merveilleux phénomène naturel. 

Quel bonheur de veiller face à cette force de la nature. 
La porte de la tente est ouverte sur le crachoir volcanique. 
C’est le bivouac le plus insolite de ma vie. 
Je n’ai pas ressenti une telle émotion face à la nature depuis la gorge du diable d’Iguazu. 

Le matin à 3h30, nous décidons de monter en haut de l’Acatenango à 3976 m d’altitude pour le lever du soleil. 
Dans le froid, le vent et les explosions de mère nature, nous grimpons au point culminant.  
Le soleil illumine peu à peu les alentours et nous parvenons à voir les volcans voisins : El Agua, Atitlan, San Pedro, El Fuego, Toliman… 
Phénoménal. 


La terrible exigence du terrain guatémaltèque 

Les yeux remplis d’étoiles, nous embrayons sur les biclounes en direction du lac Atitlan.
Nous roulons vers Quisaché, perdus, je prends la mauvaise décision de couper à travers la nature. 
Sur la carte seulement 4 km nous séparent de l’axe routier. 
C’était sans compter sur la difficulté du terrain guatémaltèque, des chemins de randonnées extrêmement étroits et très pentus. 
Pédaler relève de l’impossible, nous devons porter les vélos durant 3 heures. 
Gabin reste muet, me faisant sentir l’idiot que je suis. 
De mon côté, je sens son inquiétude, je me sens coupable, et tente de le motiver en restant positif. 
En ce moment, je comprends qu’une galère se vit tellement plus facilement seul. 
À deux tout change, il me faut m’habituer. 
Épuisés, nous bivouaquons sur le terrain des sports du village de San Antonio de Najapa. 


Le lendemain, route vers Patzicia avec 15 km de montée effrayante. 
Nous sommes sur le terrain du « Tratorcito Muj ». Un célèbre cycliste guatémaltèque, qui s’est fait repérer en grimpant les cols de la région, pour aller tailler du maïs. 
Vers Patzun, le fleuve trop rempli nous oblige à dévier vers San Jose Xepatan. 
À ce moment, tête brûlée ou con que je suis, je veux me jeter dans le fleuve et le traverser. 
Gabin me fait comprendre qu’il ne le fera pas. Cette fois je l’écoute. 
Quelques kilomètres plus tard, mon porte-bagage arrière rompt. Ma cargaison est en équilibre et nos corps sont tiraillés. 
Un camion transportant du sable se présente à notre niveau, nous sautons sur l’occasion pour monter à l’arrière et rejoindre Panajachel. 
Nous jubilons.

Sur le bord du lac, nous prenons une journée de repos face aux majestueux volcans Toliman, Atitlan et San Pedro.  
Je trouve un soudeur pour fixer ma monture. 
Nous découvrons le dialecte local, le cakchiquel et apprenons le mot le plus important « Matioch » (merci).


Dans l’authenticité des villages indigènes guatémaltèques 

Le temps file, et il ne reste que 8 jours de voyage pour mon ami Gabin. 
Nous nous donnons un objectif : atteindre Tikal coûte que coûte. Nous emploierons le cyclo-stop pour y parvenir. 
Le pick up d’Anival nous épargne la longue montée vers Solola. 
Sur les vélos, nous roulons jusqu’à Chichicastenango pour déjeuner dans son délicieux marché : tamales de riz, chuchitos et atol.
En fin de journée nous arrivons à Santa Cruz Del Quiché où nous sommes hébergés par les pompiers. 
Dans cette région où se parle le Quiche, c’est l’évènement : finale de D2 guatémaltèque, opposant l’équipe locale à son rival : Solola.
Une partie qui se solde par la défaite de l'équipe favorite de nos amis. 

La route vers Tikal se poursuit. 
Nous traversons nombres de villages traditionnels dans les régions de Quiche ou de l’Alta Verapaz. 
Chaque district se différencie par son dialecte et son style vestimentaire. 

Tractés par Alfonso ou les militaires, nous créchons à la caserne des pompiers du Cumen. 
En arrivant à Lanquin, nous avons la bonne surprise d’apprendre que le parc de Semuc Champey est fermé le lundi.
Nous nous consolons en dégustant les tamales lanquineros. 

Sur la route de Peten, nous empruntons des routes cabossées. 
Nous traversons les villages reculés de Chipam, Chireacté ou Chabilchoch.
Ici, les gens parlent Quechi et très peu espagnol. 
Nous apprenons quelques mots « bandiosh - merci ; inca - non ; eheh - oui : oust - bien ». 
Tels des ORNI (Objets roulants non-identifiés), nous sommes mitraillés par les regards. 
Nous entendons des « GRINGO GRINGO » (terme employé pour informer qu’un blanc est de passage). 
Je rétorque souvent « NO SOY GRINGO » (cette expression étant associée aux nords-américains).

Sur cette route, nous faisons la rencontre d’un camion du ministère de l’agriculture qui vient livrer des denrées alimentaires. 
Les vivres sont essentiellement composés de poudre de lait, haricots rouges, huiles et maïs. 
En arrivant à Raxruha, la municipalité nous ouvre ses portes pour camper. 


Dans la jungle tropicale de Peten 

Les pyramides de Tikal n’ont jamais été si proches.
Dans une chaleur étouffante, nous roulons dans la plus vaste région du pays - Peten -.
Au terme de 422 km à vélo et 238 km en stop, l’aventure en cyclo-stop prend fin avec Gabin à Flores.
Nous dormons dans le jardin d’Angelica.

Nous nous échappons une dernière fois au cœur des forêts tropicales guatémaltèques. 
Ici, repose le site archéologique maya de Tikal, vieux d’au moins 2000 ans.
Seuls dans cette jungle à admirer ces temples démesurés, cette grandiose flore et cette charmante faune (cota, singe, perroquet, toucan, quetzal…).


La route des pompiers pour le retour à la capitale 

Seul, je reprends la route guatémaltèque en direction de la capitale Guatemala. 
Sur les quelques 500 km me séparant de la mégapole, je suis accueilli par 5 casernes de pompiers : à Poptun, Rio Dulce, Los Amates, Teculutan et Sanarate. 
Un grand merci à ces braves humains, toujours présents pour me tendre la main. 


Deux journées de la bicyclette 

De retour dans la famille de Sergio dans le quartier de Villasol, je prépare deux journées de la bicyclette. 
L’une avec l’orphelinat de la Mama Carmen et l’autre avec l’établissement de l’Esperanza Juvénile. 

Rencontre avec la Casa Hogar de la Mama Carmen - 3 Juin 2021

Cette rencontre avec la Mama Carmen et les enfants de l’orphelinat est d’une intensité rare. 
Une dame, Carmen, 79 ans, me marquera pour la vie. 
Touchée par la terrible séquestration de son fils il y a 50 ans, elle a prié Dieu chaque jour durant 2 ans pour retrouver son enfant. 
La grâce venue, l'orphelinat de la Mama Carmen a vu le jour.
Depuis c’est 2 500 enfants sauvés et accueillis. 

Un toit, de la nourriture, un lit, de l’amour, de la protection, une éducation, de la confiance, de la paix.
Mama Carmen s’est promise d’offrir une digne vie à tous les petits êtres de notre planète. 
C’est avec une incroyable énergie que cette femme se bat pour les enfants. 
Une organisation pointue pour le ménage, et les repas d’une maison qui accueille jusqu’à 80 enfants. 
Entre la vente de tamales et de café, Carmen subsiste à nourrir décemment l’ensemble de ces petits anges.
Aidée par sa famille et autres bénévoles, c’est le bisou matinale de chaque enfant qui remplit cette femme de bonheur. 
Ce dévouement et cette persévérance sont admirables. Une vraie leçon de vie. 

Suite à la vente de vêtements, j’ai pu organiser une journée de la bicyclette pour les 32 enfants présents.
Ce 3 juin 2021, je me suis rendu dans cette maison avec un sac surprise pour chacun d’entre eux (jouets, peluches, livres, bonbons et t-shirts..)
Chaque enfant s’est vu attribuer une photo de mon voyage afin que je leur explique mon parcours. 
Le regard captivé des enfants, les questions et les sourires pleuvaient au rythme de la charge émotionnelle qui envahissait mon corps. 
Après avoir offert 6 vélos, j’ai installé ma tente et longuement partagé avec les enfants.
Carmen m’a proposé de manger avec eux et j’ai fini par rester dormir dans la maison. 

Un grand merci à tout le monde d’avoir permis cette journée. 
Merci à Carmen pour cet exemple de vie. 
L’écouter m’a conforté sur le chemin que je souhaite donner à ma vie.
Le projet continue et l’objectif reste de pouvoir procurer du bonheur aux enfants via le vélo. 
L’histoire reste à écrire.
C’est le visage ému, les yeux brillants à l’esquisse d’un sourire que j’écris ces quelques mots.


Rencontre avec l’Esperanza Juvenil - 4 juin 2021. 

Après avoir été interviewé par Prensa Libre, un quotidien guatémaltèque.
Je rends visite à l’Esperanza Juvenil. 
Cette ONG donne la chance aux enfants des « zones reculées » d’étudier.
117 filles et garçons des quatre coins du Guatemala (17 départements représentés sur 22) viennent poursuivre leur cursus scolaire ici. 
Les enfants sont retenus sur dossier dès leurs 9 ans, et restent jusqu’à leur diplôme universitaire. 

Durant 3 heures, je leur explique mon aventure. 
L’enthousiasme est de mise de toute part. 
Un groupe de jeune fille me fait le bonheur de chanter une chanson en cakchiquel, et un bel échange s’est poursuivi tout l’après midi.
Que du bonheur de pouvoir poursuivre ce projet cyclo-éducatif.

Un grand merci à la famille de Sergio pour l’organisation de ces deux journées et, pour ce magnifique accueil. 
De mon côté, je réalise le test covid et je m’en vais. 
Une nuit dans la caserne des pompiers de Chiquimulilla, quelques kilomètres au milieu de lacs et jungle, un ultime café offert sur la route et le Salvador va s’offrir à moi. 

À suivre 


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