De Nelson lakes à Arthur Pass
La traversée des Nelson Lakes
Pour quitter Nelson, j'emprunte le Great Taste Trail, de jolis chemins au milieu des champs de vignes.
60 km pour rejoindre Golden Downs et y planter ma tente norvégienne.
Le lieu est vide mais semble avoir vécu. Après la ruée vers l'or, il fut le fief de la reforestation de la Nouvelle Zélande dès 1929.
Les Nelsons Lakes sont en partie recouverts de pins corses aujourd'hui.
Au réveil je traverse les Nelsons Lakes jusqu'à St Arnaud.
Le lac Rotoiti m'offre un superbe spot, j'observe un camaïeu de bleu dessiné entre le lac et le ciel.
Je fais la connaissance des sulfureux sandflies pendant mon déjeuner.
Les piqûres de ces insectes sont terrifiantes les jours suivants.
Le soir, en frappant à une porte, Michelle et Terry m'accueillent, m'offrent de bonnes bières artisanales et une soupe réchauffante.
Le 29 Mai direction Spring Junction en passant par Murchison, des gravel roads et le terrible col de Maruia.
Dans ces chemins terreux, je me tue à l'effort et me fait surprendre par le froid au sommet. J'ai fait l'erreur d'être trempé de sueur à la
tombée de la nuit. Et ça ne pardonne pas, le froid s'empare de tous mes membres.
Il me reste 25 km à rouler lorsqu'un fermier néo-zélandais me propose de m'emmener à destination.
Je ne peux pas refuser, j'arrive en pick up chez Peter et Robyn.
Une chaleureuse maison en bois, un délicieux dîner, un plumard et de la bonté humaine. Tout ce qu'il me fallait pour me ressourcer !
Le lendemain, direction Reefton chez Dan et Robyn, des amis cyclistes de mes hôtes de la veille.
Durant cette courte étape, les nuages se mêlent aux montagnes et offrent un décor féerique. J'en prend plein les mirettes.
A l'arrivée dans la petite bourgade, je fonce m'équiper pour le froid : pantalon, chaussons et gants.
Le soir, je partage une belle soirée avec ces deux anglais ayant traversés le monde en vélo de Londres à Singapour pour leurs 50 ans !
Inspirant.
La communauté des Gloriavales
Sous les conseils aiguisés de Dan, je me lance dans un merveilleux itinéraire.
En passant par Ngahere puis en longeant Nelson creek Road, je me retrouve au pied de Bell Hill pour passer la nuit.
Je cherche à planter ma tente lorsque je frappe à la porte une étonnante petite ferme.
Cinq femmes sont habillées en religieuses.
Quand je leur demande l'hospitalité, elles me répondent que c'est le mari qui doit prendre la décision.
C’est donc un trentenaire et papa de 11 enfants qui m'explique que je suis au milieu de la communauté chrétienne des Gloriavales.
Cette communauté fonctionne autour d'un village central, et est régie par un culte religieux créé par Neville Cooper en 1969.
La majorité des membres vit au sein du village, seuls les fermiers bien placés hiérarchiquement ont le privilège d'avoir une maisonnette.
Au milieu de cette grande famille, ils m'assènent de questions sur mon voyage et sur la France.
Je suis un peu l'attraction, et je prends conscience que c'est pour eux hors du commun.
Un van vient récupérer les garçons pour aller dormir au village alors que les filles restent à la maison.
Le chef de la communauté me refuse dans le village à cause du Covid mais je peux rester dans le champ pour y planter ma tente.
Après quelques recherches, j’apprends que cette communauté de 500 personnes est très controversée en Nouvelle Zélande et fait l'objet de
nombreuses enquêtes.
De mon côté, je garde un bon souvenir de cette rencontre improbable.
Les Alpes du Sud par Arthur Pass : mon col le plus éprouvant
Sous un grand soleil, je prends la route dans ces montagnes de l'île du Sud.
James Cook, explorateur/colonisateur, a nommé cette chaîne montagneuse Alpes du Sud en référence aux Alpes françaises.
Arthur Pass est né de la volonté des barons de l'industrie de l'or de créer des passages à travers le massif montagneux.
Le tunnel d'Otira fut créé à cette occasion. Je m'y arrête pour une collation mielleuse.
Puis ça devient physiquement l'enfer.
Une portion de 5 km jusqu'à 16% me coupe les jambes.
A titre de comparaison les cols du Tourmalet ou du Galibier pointent au maximum à 10%.
Les lacets n'existent pas en Nouvelle Zélande, tout monte à pic !
Les moteurs des voitures ronflent pendant que mes bras poussent la cargaison de 40 kg.
Avec la force de la tête, j'arrive jusqu'au village d'Arthur Pass.
Quémander l'hospitalité ne fonctionne pas, je prends place dans la cuisine de l'air de camping communal.
Sous ces froides températures mon sac de couchage confort 10 degrés n'est plus performant.
Un couple Franco-Australien Tom et Laurène me prêtent des couettes pour la nuit.
Changement d'itinéraire pour Christchurch
Exténué par les nuits froides, je me résigne à faire un détour par Christchurch, 150 km m'en séparent.
Le prolongement des alpines jusqu'à Castle Hill est magnifique.
Les nuages se mélangent aux vallées, la flore est gelée, les montagnes enneigées et le ciel sont segmentés de nombreuses couleurs.
Dans ce moment d'apothéose, je me sens si privilégié d'éprouver ces sentiments face à la nature.
Après 50 km, dans un décor rocailleux, je déjeune au pied de Castle Hill que le Dalaï Lama qualifie d'endroit le plus spirituel au monde.
Et quelle émotion lorsque je sors des Alpines sur la face Est.
C'est dégagé avec toutes les terres agricoles en contrebas.
Du haut je peux apercevoir Christchurch et ses terrasses.
J'imagine les vagues frapper la côte est néo-zélandaise.
Un moment de méditation telle une récompense des efforts passés.
Ma descente vers le plat pays est épique.
Les voitures me ferment la voie et me font comprendre qu'elles ne vont pas me doubler.
Tambour battant, je descends comme un dingue.
Dans une épingle, je m'arrête et salue chaleureusement tous ces automobilistes ayant respectés un cycliste.
Sur le troisième plateau et le pignon neuf, j'entame le faux plat descendant vers Christchurch.
Apres 85 km, j'entame ma quête d'hospitalité à Barfield puis à Springfield.
Les refus des uns m'offrent la bienveillance des autres. Le destin fait si bien les choses.
Angie et Terry m'ouvrent les portes de leur maison et de leur vie.
Ces moments de sincérité et d'échanges me touchent toujours au plus haut point.
Je mesure leur intensité lors des câlins que nous échangeons à chaque au revoir.
Christchurch, couvre-moi je suis là !